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Élargir le lectorat
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L'apparition de la notion de « lectorat » est l'un des
phénomènes majeurs découlant tout naturellement du nouveau système induit par
la « révolution de l'imprimé » : reproduction mécanique du texte
et « démocratisation » de la lecture, accès facilité à l'écrit, mise
en place de lieux spécifiques à l'acquisition de livres, constitution d'un « milieu
du livre », etc. Avec l'imprimé apparaît un nouveau public, plus
diversifié, dont il faut identifier la demande et qu'il s'agit de satisfaire en
publiant des ouvrages appropriés à leurs attentes. À Lyon par exemple
(véritable capitale de l'imprimerie humaniste), les ateliers ont su rapidement
adapter leur politique éditoriale à un tout nouveau public, aux « modes de
pensée et de culture d'une frange de la population urbaine laïque (ou
« laïcisée ») et non universitaire qui accède au livre - plutôt qu'à
l'écrit - par l'intermédiaire de l'imprimé ».
C'est cet élargissement du public qui amène les éditeurs à publier des ouvrages
en langue vernaculaire (c'est-à-dire en français), et ce dès la période des incunables. Ce phénomène s'accroît au cours du XVe siècle,
favorisant notamment la pratique massive de la traduction, motivée par la
volonté d'élargir le lectorat potentiel des textes, et par ailleurs encouragée
par une politique linguistique qui s'efforce d'inciter à l'usage de la langue
nationale. Ces traductions concernent beaucoup les auteurs anciens (Virgile et
Ovide surtout, mais aussi les historiens tels César, Suétone ou Tacite). Mais
il faut aussi noter le succès grandissant que connaissent les ouvrages traduits
de l'allemand (pensons au Narrenschiff - la
Nef des fous - de Sebastian Brant),
de l'italien ou de l'espagnol. Dans le domaine littéraire, on peut par exemple
citer ce véritable « best-seller » qu'est la série des Amadis de Gaule, cycle de romans de
chevalerie traduits de l'espagnol et dont la publication est lancée par la
parution du premier livre traduit par Nicolas Herberay des Essarts en 1540. On
peut encore citer la vogue du « roman sentimental » qui fait fureur à
partir des années 1530 avec, par exemple, la traduction des romans de Diego de
San Pedro.