Mme Jiahong GUO
Soutiendra vendredi 20 décembre 2024 à 9 h 30
Salle des Actes n° 009 à l’Université Paul-Valéry Montpellier 3, Site Saint-Charles 2
une thèse de DOCTORAT
Discipline : Sciences de l'information, de la communication et de la documentation
Titre de la thèse : Les relations intergénérationnelles dans les familles migrantes chinoises à Paris, originaires de Teochew : une approche de la communication interculturelle
Composition du jury :
- Mme Sarah CORDONNIER, Professeure, Université Lumière Lyon 2
- M. Dominique DESJEUX, Professeur émérite, Université Paris Cité
- Mme Sarah LABELLE, Professeure, Université Paul-Valéry Montpellier 3
- M. Gérard RÉGIMBEAU, Professeur émérite, Université Paul-Valéry Montpellier 3, directeur de thèse
- Mme Xiaomin YANG, Professeure, Université du Guangdong (Chine)
- M. Lihua ZHENG, Professeur émérite, Université du Guangdong (Chine), codirecteur de thèse
Résumé de la thèse :
La France, avec son histoire longue de pays d’immigration, attire depuis longtemps des immigrants du monde entier. Dans les années 1970 et 1980, la persécution du régime des Khmers rouges a contraint un nombre considérable d’immigrants Teochew, d’origine chinoise et très majoritairement nés au Cambodge, à fuir leur pays de naissance pour finalement s’installer en France. Bien que ce groupe représente l’un des trois principaux groupes de la communauté chinoise en France, il reste peu étudié dans les recherches scientifiques et moins en encore sous l’angle des sciences de l’information et de la communication. C’est cette lacune dans la recherche qui nous a incitée à entreprendre cette étude afin d’approfondir les expériences spécifiques de cette population migrante.
En s’appuyant sur une méthodologie qualitative, cette recherche vise à étudier les processus d’acculturation des deux générations d’immigrants Teochew en France et leur influence sur la dynamique des relations intergénérationnelles. Durant plus de trois ans de travail sur le terrain en Île-de-France, cette étude s’est appuyée sur des entretiens semi-directifs avec douze primo-arrivants et treize jeunes de la deuxième génération, ainsi que des observations participantes au sein de cinq familles, de deux associations (dont une que nous avons vue naître) et de leur quartier. La recherche a également été complétée par une méthode du portrait et la collecte de données secondaires, ce qui a permis de constituer un corpus riche. Grâce à l’analyse par théorisation ancrée, nous avons procédé à une analyse ascendante de ces données afin de mettre en lumière les expériences spécifiques d’acculturation et les défis relationnels que les deux générations rencontrent.
Cette étude montre que les situations d’acculturation des immigrés Teochew sont étroitement liées au développement des relations intergénérationnelles. Nous avons identifié les facteurs influençant ce processus d’acculturation et les avons classés en trois niveaux : culturel, contextuel et individuel. Généralement, les primo-arrivants Teochew sont attachés à leur culture d’origine et s’intègrent peu dans la société française, tandis que les jeunes de la deuxième génération, nés et élevés en France, tendent davantage à s’intégrer dans la société d’accueil, avec une identification plus faible à leur culture d’origine. Il en résulte ainsi des écarts d’acculturation entre les deux générations, se manifestant principalement dans cinq dimensions : la manière de communiquer, les compétences numériques, les valeurs, la structure familiale et la transmission de la culture d’origine. Cependant, notre étude a révélé la résilience entre les deux générations, facilitée par la médiation culturelle et numérique au fil du temps. En outre, les écarts d’acculturation n’affectent pas seulement les problèmes psychologiques chez les jeunes, mais entraînent aussi un sentiment de solitude chez les aînés, influençant leur perception négative de l’attitude de leurs enfants vis-à-vis de leurs responsabilités envers eux selon la culture Teochew. En somme, l’acculturation et le développement des relations intergénérationnelles dans le groupe d’immigrés Teochew en France constituent un processus interculturel, dynamique et évolutif, façonné par les changements environnementaux et les différentes étapes du parcours de vie.
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France, with its long history as a country of immigration, has been attracting immigrants from around the world for a long time. In the 1970s and 1980s, the persecution by the Khmer Rouge regime forced a considerable number of Teochew immigrants, of Chinese origin and mostly born in Cambodia, to flee their country of birth and eventually settle in France. Although this group represents one of the three main groups within the Chinese community in France, it remains under-researched in scientific studies, especially from the perspective of information and communication sciences. This research gap prompted us to undertake this study in order to delve deeper into the specific experiences of this migrant population.
Using a qualitative methodology, this research aims to study the acculturation processes of two generations of Teochew immigrants in France and their influence on the dynamics of intergenerational relations. Over more than three years of fieldwork in Paris and the surrounding region, this study relied on semi-structured interviews with twelve first-generation immigrants and thirteen second-generation youths, as well as participant observations within five families, two associations (including one we witnessed being founded), and their neighborhood. The research was also complemented by a portrait method and the collection of secondary data, which helped create a rich corpus. Through grounded theory analysis, we conducted a bottom-up analysis of these data to highlight the specific acculturation experiences and relational challenges faced by both generations.
This study shows that the acculturation situations of Teochew immigrants are closely linked to the development of intergenerational relations. We identified the factors influencing this acculturation process and classified them into three levels: cultural, contextual, and individual. Generally, Teochew first-generation immigrants remain attached to their culture of origin and integrate little into French society, while the second-generation youth, born and raised in France, tend to integrate more into the host society, with a weaker identification with their culture of origin. This results in acculturation gaps between the two generations, primarily manifesting in five dimensions: communication styles, digital skills, values, family structure, and the transmission of the culture of origin. However, our study revealed resilience between the two generations, facilitated by cultural and digital mediation over time. Moreover, these acculturation gaps not only affect psychological issues among the youth but also lead to a sense of loneliness among the elders, influencing their negative perception of their children's attitudes towards their responsibilities according to Teochew culture. In sum, the acculturation and development of intergenerational relationships within the Teochew immigrant group in France constitute an intercultural, dynamic, and evolving process, shaped by environmental changes and different stages of life.