Introduction
L'émergence d'une langue
Dès le Moyen âge l'occitan est devenu une langue romane à part entière : langue de communication quotidienne, langue utilisée dans les registres officiels savants et prestigieux. L'occitan occupe progressivement toute la gamme de registres qu'une langue en situation d'usage normal peut occuper. Rien ne semble plus devoir s'opposer alors au développement de l'occitan comme grande langue de culture européenne, à l'instar de l'italien, de l'espagnol ou du français.
Au Moyen âge, la langue occitane comme les autres langues romanes n'a pas encore de nom. En 1216, Raymond VI de Toulouse l'appelle tout simplement nòstra lenga, notre langue. Elle connaît cependant diverses dénominations au niveau littéraire (romans, proensals, lemosi). Tout comme pour le français, souvent désigné lui aussi par roman, il s'agit avant tout de distinguer du latin la langue qui en est issue. L'adjectif roman finira par s'appliquer à toutes les langues qui se sont constituées à partir du latin populaire. Le nom de lenga d'òc n'apparaîtra que plus tard, entre la fin du XIIIe et le début du XIVe siècle, à la fois dans l'usage administratif du Royaume et sous la plume de Dante qui distingue langue d'oc, langue d'oïl et langue de si à partir de la particule affirmative « oui » employée respectivement par les diverses langues qu'il prend en compte.
Dès le Moyen âge, les langues romanes vont commencer peu à peu à s'écrire et l'occitan sera dans ce domaine une des plus précoces. À partir du XIe siècle, l'occitan occupe progressivement tous les registres « nobles » que seul le latin occupait jusqu'ici. Ce sont d'abord les Trobadors qui à travers l'invention de l'amour courtois, la fin'amor, vont répandre un modèle littéraire poétique et musical qui fera florès dans les cours européennes. L'occitan devient également une langue administrative (Voir la Chronique en langue occitane du Petit Thalamus) juridique et commerciale qui concurrence de plus en plus le latin dans ces divers domaines. C'est aussi une langue scientifique dans laquelle sont rédigés ou traduits des traités de chirurgie (Voir le manuscrit de la Chirurgie d'Albucassis), de mathématiques, de rhétorique, etc. Enfin, c'est aussi la langue de la foi qui sert à la traduction du Nouveau Testament et du Rituel cathare (entre 1280 et 1330).
Cette pratique écrite de l'occitan dure plusieurs siècles et permet ainsi la fixation progressive d'une graphie autochtone, relativement cohérente dans son fonctionnement, et qui tend clairement à imposer une forme écrite "noble", bien distincte des réalisations dialectales étroites de l'aire dans laquelle les textes sont rédigés.